Les paraboles de Jésus

Chapitre 2

Un semeur sortit pour semer

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Le semeur et la semence

La parabole du semeur illustre les mystères du royaume des cieux et l'oeuvre du Divin laboureur en faveur de son Église. Semblable au semeur qui arpente son champ fraîchement remué, le Christ sema à pleines mains la semence de vérité. Ses paraboles étaient cette graine d'où devaient éclore les plus précieuses vérités de sa grâce. À cause de sa simplicité, la parabole du semeur n'a pas été appréciée à sa juste valeur. Par la semence lancée dans le sol, le Christ désire attirer notre attention sur la semence évangélique qui a pour effet de ramener l'homme à Dieu. C'est le souverain Maître de l'univers qui nous a donné la parabole de la menue semence, et ce sont les mêmes lois de la germination qui agissent dans les coeurs pour y faire fructifier la semence de la vérité.

Une foule s'était rassemblée sur les bords de la mer de Galilée pour voir et écouter Jésus. Les malades, étendus sur leurs nattes, attendaient le moment de lui exposer leurs besoins. Le Christ avait reçu de Dieu le pouvoir de guérir les infirmités d'une race pécheresse, aussi son premier soin était-il de chasser la maladie et de répandre autour de lui la vie, la santé et la paix.

Comme la foule augmentait sans cesse et se pressait autour de Jésus au point que les nouveaux venus ne pouvaient plus arriver jusqu'à lui, le Sauveur, après avoir adressé quelques paroles aux pêcheurs qui se trouvaient dans leurs barques, monta dans l'embarcation qui devait le conduire de l'autre côté du lac. Puis, ayant demandé à ses disciples de s'éloigner quelque peu du rivage, il se mit à prêcher.

Le long du littoral s'étendait la magnifique plaine de Génésareth, surplombée par des collines. Dans la plaine, comme sur le flanc des collines, des semeurs et des moissonneurs s'affairaient, les uns à jeter la semence, les autres à moissonner les premières récoltes. Considérant cette scène, le Christ s'adressa à la foule en ces termes :

« Un semeur sortit pour semer. Comme il semait, une partie de la semence tomba le long du chemin : les oiseaux vinrent, et la mangèrent. Une autre partie tomba dans un endroit pierreux, où elle n'avait pas beaucoup de terre : elle leva aussitôt, parce qu'elle ne trouva pas un sol profond; mais, quand le soleil parut, elle fut brûlée et sécha, faute de racines. Une autre partie tomba parmi les épines : les épines montèrent, et l'étouffèrent. Une autre partie tomba dans la bonne terre : elle donna du fruit, un grain cent, un autre soixante, un autre trente. » (Matthieu 13:4-8)

La mission du Christ fut incomprise de ses contemporains, car sa venue sur la terre ne correspondait pas à leur attente. Il était le centre de toute l'économie juive. Les cérémonies imposantes du culte avaient été établies par Dieu. Elles étaient destinées à annoncer qu'au temps marqué apparaîtrait celui qu'elles préfiguraient. Mais les Juifs s'étaient attachés aux formes et aux rites et avaient oublié totalement leur signification symbolique. Les traditions, les maximes et les préceptes humains avaient voilé l'enseignement divin et constituaient autant d'obstacles qui les empêchaient de parvenir à la connaissance de la véritable religion. Et quand vint la Réalité dans la personne du Christ, ils ne reconnurent pas en lui l'accomplissement de tous leurs types, la substance même des ombres de leurs services religieux. Ils rejetèrent l'antitype et se cramponnèrent aveuglément à leurs symboles et à leurs cérémonies devenues inutiles. Le Fils de Dieu était venu, mais ils continuaient à demander un signe. Ils répondaient au message : « Repentez-vous, car le royaume des cieux est proche » (Matthieu 3:2) en réclamant un miracle. L'Évangile de Jésus-Christ fut pour eux une pierre d'achoppement parce qu'ils exigeaient des signes au lieu d'un Sauveur. Pour eux, le Messie devait être un vaillant guerrier qui établirait par de grands faits d'armes son empire sur les ruines des royaumes terrestres. C'est à cette attente que répondit le Sauveur par la parabole du semeur. Ce n'est ni par la force, ni par de violents combats que devait triompher le royaume de Dieu, mais par l'introduction d'un principe nouveau dans le coeur des hommes.

« Celui qui sème la bonne semence, c'est le Fils de l'homme. » (Matthieu 13:37) Le Christ est venu sur la terre, non comme un roi, mais comme un semeur; non pour renverser des empires, mais pour répandre la semence; non pour entraîner ses partisans vers des triomphes terrestres et la gloire nationale, mais pour les former en vue d'une moisson qui nécessiterait des labeurs patients, des pertes et des désillusions.

Les pharisiens saisissaient le sens de la parabole, mais la leçon ne leur convenait guère; ils faisaient semblant de n'y rien comprendre. Quant à la foule, elle était encore trop étrangère au grand mystère présenté par le nouveau Maître pour en saisir toute la portée, bien que ses paroles aient étrangement remué les coeurs et amèrement déçu leurs ambitions. Les disciples eux-mêmes ne comprirent pas cette parabole, mais leur intérêt avait été éveillé. Ils vinrent trouver Jésus en particulier pour lui en demander une explication.

C'était justement ce qu'attendait le Maître. Ils répondaient ainsi à son secret désir de pouvoir leur donner un enseignement plus complet. Il leur commenta donc la parabole comme il continue à faire comprendre sa parole à tous ceux qui le recherchent sincèrement. Ceux qui étudient les Écritures le coeur ouvert à l'action du Saint-Esprit en saisiront le sens. « Si quelqu'un veut faire sa volonté, dit le Christ, il connaîtra si ma doctrine est de Dieu, ou si je parle de mon chef. » (Jean 7:17) Tous ceux qui viennent à lui pour mieux saisir ses enseignements ne seront pas déçus. Il leur dévoilera les mystères du royaume des cieux, et ces mystères seront compris de tous ceux qui aspirent à la connaissance de la vérité. Une céleste clarté brillera dans le temple de leur âme et elle sera pour leur entourage comme un flambeau sur un sentier ténébreux.

« Un semeur sortit pour semer. » En Orient, la situation était incertaine. On était exposé à de graves dangers, ce qui obligeait les gens à vivre dans des villes entourées de murailles, de sorte que chaque jour on pouvait voir le cultivateur se rendre à son travail, hors des murailles de la ville. De même, le Christ, le divin Semeur, sortit pour semer. Il quitta un séjour de paix et de sécurité, sacrifiant la gloire qu'il avait auprès du Père avant même que le monde fût, et abandonna la place qu'il occupait sur le trône de l'univers. Il vint sur la terre, homme de douleur, exposé à la tentation. Dans la solitude, il sema avec larmes et arrosa de son sang la semence de vie qu'il était venu apporter à un monde perdu.

Comme lui, ses serviteurs doivent sortir pour semer. Appelé à la vocation de semeur de vérité, Abraham reçut cette exhortation : « Va-t'en de ton pays, de ta patrie, et de la maison de ton père dans le pays que je te montrerai. » (Genèse 12:1) « Il partit sans savoir où il allait. » (Hébreux 11:8) L'apôtre Paul, en prière au temple de Jérusalem, reçut cet ordre du ciel : «Va, je t'enverrai au loin vers les nations. » (Actes 22:21) Ceux qui reçoivent un appel à s'unir à Jésus-Christ doivent aussi tout quitter pour le suivre. Cela ne se fait pas sans rompre avec d'anciennes relations, sans briser des plans soigneusement établis, sans renoncer à des espérances terrestres. Avec peine, avec larmes, dans l'isolement et l'abnégation, il faut jeter la semence.

« Le semeur sème la parole. » (Marc 4:14) Le Christ est venu pour semer la vérité sur la terre. Depuis la chute, Satan n'a cessé de répandre les germes de l'erreur. Il parvint, par un mensonge, à dominer l'homme et il s'efforce de renverser le royaume de Dieu ici-bas afin de placer l'humanité sous son hégémonie. Un semeur d'un monde supérieur, le Christ, vint sur la terre pour jeter les semences de vérité. Celui qui avait pris part aux conseils de Dieu, qui habitait les profondeurs mêmes du sanctuaire de l'Éternel, pouvait apporter sur la terre les purs principes de la vérité. Depuis la chute de l'homme, le Christ n'a cessé de révéler la vérité à l'humanité et de lui communiquer l'incorruptible semence, « la parole vivante et permanente de Dieu » (1 Pierre 1:23). Dans la première promesse faite en Éden à notre race déchue, le Christ semait la semence évangélique. Mais la parabole du semeur s'applique tout particulièrement à son ministère parmi les hommes et au ministère de son Église.

La semence, c'est la parole de Dieu. Toute semence a en soi un germe de vie dans lequel est cachée la vie de la plante. La parole de Dieu est aussi un facteur de vie : « Les paroles que je vous ai dites, fait remarquer Jésus, sont esprit et vie. ... Celui qui écoute ma parole et qui croit à celui qui m'a envoyé, a la vie éternelle. » (Jean 6:63; 5:24) Chaque commandement, chaque promesse de la Bible renferme une puissance, la vie même de Dieu, qui nous donne le pouvoir d'obéir au commandement et de transformer la promesse en réalité. Celui qui, par la foi, reçoit la parole, reçoit la vie même et le caractère de Dieu.

Toute semence porte en elle du fruit selon son espèce. Mise en terre dans des conditions normales, la graine manifestera sa vitalité dans la plante qui sortira d'elle. Reçue dans votre âme, par la foi, l'incorruptible semence de la parole de Dieu produira une vie et un caractère conformes au caractère et à la vie de Dieu.

Les docteurs en Israël ne semaient pas la bonne semence de la parole. L'oeuvre du Christ offrait un contraste frappant avec celle des rabbins de son époque dont la principale préoccupation était d'exposer des traditions, des théories et des spéculations humaines. Il leur arrivait souvent de remplacer la parole de Dieu par ce que des hommes en avait dit ou écrit. Leur enseignement n'avait pas le pouvoir de vivifier l'âme. Le Christ, au contraire, choisissait toujours les Écritures comme thème central de ses exposés. Il arrêtait ses contradicteurs avec un catégorique : « il est écrit » (Matthieu 4:4), « n'avez-vous jamais lu dans les Écritures ...? » (Matthieu 21:42), « qu'y lis-tu ? » (Luc 10:26) Il ne laissait jamais passer l'occasion de jeter la semence de vie dans le coeur de l'ami ou de l'ennemi. Il est le chemin, la vérité et la vie, la Parole même de Dieu. Néanmoins, il se référait toujours aux Écritures en disant : « Ce sont elles qui rendent témoignage de moi. » (Jean 5:39) Et, « commençant par Moïse et par tous les prophètes », il expliquait à ses disciples, « dans toutes les Écritures ce qui le concernait. » (Luc 24:27)

Les serviteurs du Christ doivent suivre son exemple. Aujourd'hui comme hier, les vérités fondamentales de la parole de Dieu sont enfouies sous les théories et les spéculations des hommes. Nombreux sont les prétendus ministres de l'Évangile qui n'acceptent pas toute la Bible comme la parole inspirée de Dieu. L'un n'admet pas ceci, l'autre repousse cela. Ils s'accordent pour mettre leur jugement au-dessus de l'Écriture, et le message qu'ils enseignent ne repose que sur leur propre autorité. L'origine et l'autorité divines de la parole sont détruites. Des semences d'infidélité sont largement répandues et les fidèles sont dans la confusion, ne sachant plus ce qu'ils doivent croire. Nombreuses sont les croyances qu'on n'a pas le droit de conserver. Au temps du Christ, les rabbins attribuaient un sens mystique et outré à certains passages des Écritures. Ils s'évertuaient ainsi à éliminer la force de la parole de Dieu qui condamnait leurs pratiques. Il en est de même de nos jours. On rend l'Écriture obscure et mystérieuse afin d'excuser la transgression de la loi. Au cours de sa vie terrestre, Jésus condamna cette manière d'agir. Il affirmait que la parole de Dieu pouvait être comprise par tous les hommes. Il attirait l'attention sur l'autorité absolue des Écritures. C'est ce que nous devrions faire nous-mêmes. La Bible doit être présentée au monde comme la parole d'un Dieu infini, comme le point final de toute controverse et le fondement de toute croyance.

La Bible a été privée de sa puissance et il en est résulté un abaissement de la spiritualité. Bien des sermons prêchés de nos jours ne révèlent pas cette manifestation de la puissance divine qui réveille les consciences et communique la vie à l'âme. Les auditeurs ne peuvent plus dire : « Notre coeur ne brûlait-il pas au-dedans de nous, lorsqu'il nous parlait en chemin et nous expliquait les Écritures. » (Luc 24:32) Nombreux sont ceux qui crient au Dieu vivant et qui soupirent après la présence divine. Les systèmes philosophiques ou les productions littéraires les plus admirables ne sauraient satisfaire le coeur humain. Les affirmations et les inventions de l'homme sont sans valeur. Seule la parole de Dieu doit parler aux âmes. Puissent ceux qui sont lassés des traditions, des maximes et des théories humaines, entendre la voix de celui dont la parole peut communiquer la vie éternelle!

Le thème favori du Christ était la tendresse paternelle de Dieu et son abondante grâce. Il insistait sur la sainteté de son caractère et de sa loi; il se présentait lui-même comme le chemin, la vérité et la vie. Que ce soit aussi les thèmes des ministres du Christ. Exposez la vérité telle qu'elle est en Jésus. Présentez clairement les exigences de la loi et de l'Évangile. Parlez aux hommes de la vie de sacrifice du Christ, de ses humiliations, de sa mort, de sa résurrection glorieuse, de son ascension, de son intercession en leur faveur dans les parvis célestes et de sa promesse : « Je reviendrai, et je vous prendrai avec moi. » (Jean 14:3)

Au lieu de perdre votre temps à discuter des théories erronées ou à chercher à combattre les adversaires de l'Évangile, suivez l'exemple du Christ. Que vos discours procèdent de la source limpide qui procure la vie. « Prêche la parole, insiste en toute occasion, favorable ou non. » (2 Timothée 4:2) « Heureux vous qui partout semez le long des eaux. » (Ésaïe 32:20) « Que celui qui a entendu ma parole rapporte fidèlement ma parole. Pourquoi mêler la paille au froment? dit l'Éternel. » (Jérémie 23:28) « Toute parole de Dieu est éprouvée. ... N'ajoute rien à ses paroles, de peur qu'il ne te reprenne et que tu ne sois trouvé menteur. » (Proverbes 30:5,6)

« Le semeur sème la parole. » Tel est le grand principe qui devrait être à la base de notre système d'éducation. « La semence, c'est la parole de Dieu. » (Luc 8:11) Dans la plupart des écoles, aujourd'hui, la Bible est mise de côté et les esprits se nourrissent d'autres sujets. L'étude des auteurs incrédules tient une trop grande place dans nos programmes scolaires et le scepticisme se trouve mêlé aux enseignements de nos manuels. La recherche scientifique tend à égarer les esprits à cause des interprétations erronées qui sont données de ses découvertes. Ce que l'on appelle enseignements de la science est mis en concurrence avec la parole de Dieu et on fait passer celle-ci pour incertaine et indigne de confiance. Des semences de doute sont jetées dans le cerveau de la jeunesse et à l'heure de la tentation, elles lèvent infailliblement. Sans la foi dans la parole de Dieu, l'âme en danger n'a plus de guide, et la jeunesse est conduite dans des sentiers qui l'éloignent de Dieu et de la vie éternelle.

C'est en grande partie à cette cause que l'on peut attribuer l'iniquité qui règne dans le monde à notre époque. Quand les Écritures sont délaissées, les mauvaises passions du coeur naturel échappent à leur puissance de contrôle. Les hommes sèment pour la chair et moissonnent de la chair la corruption.

C'est ici encore qu'il faut chercher la raison principale de notre faiblesse mentale. Lorsqu'on se détourne de la parole de Dieu pour se nourrir des écrits d'auteurs non inspirés, l'esprit se rabougrit et perd de sa vigueur. Peu à peu, il s'éloigne des principes larges et profonds de la vérité immuable. Notre intelligence s'adapte à ce qui lui est devenu familier et se laisse absorber par des aspirations purement matérielles; elle s'affaiblit et la faculté de s'assimiler les choses spirituelles diminue au point de devenir, après un certain temps, incapable d'expansion.

C'est là de la fausse éducation. L'oeuvre de tout éducateur devrait être de mettre la jeunesse en rapport avec les grandes vérités de l'inspiration. Telle est l'éducation essentielle pour la vie présente et celle à venir.

N'allons pas croire que cela contrecarre l'étude des sciences ou rabaisse le niveau de l'instruction. La connaissance de Dieu est aussi élevée que les cieux et aussi vaste que l'univers. Rien ne peut ennoblir et vivifier l'esprit comme la méditation des grands thèmes qui concernent notre vie éternelle. Que la jeunesse cherche à comprendre le sens de ces vérités qui viennent de Dieu, et ses facultés intellectuelles se développeront. Tout étudiant qui s'efforce de mettre en pratique la parole de Dieu enrichit ses connaissances et s'assure ainsi un trésor impérissable.

L'éducation qu'il faut chercher à acquérir en sondant les Écritures, c'est une connaissance pratique du plan du salut. Elle restaurera l'image de Dieu dans l'âme, fortifiera l'esprit contre l'assaut des tentations et permettra à l'étudiant de collaborer avec Jésus-Christ dans sa mission de miséricorde. Elle fera de lui un membre de la famille divine et le préparera à participer à l'héritage des saints.

Mais celui qui enseigne la vérité sacrée ne peut communiquer que ce qu'il connaît par expérience. Le semeur sème sa semence (Luc 8:5). Le Christ enseignait la vérité parce qu'il était la vérité. Sa pensée, son caractère, son expérience personnelle s'incarnaient dans sa prédication. Ainsi doit-il en être de ses serviteurs : ceux qui enseignent la parole de Dieu doivent l'assimiler en la mettant en pratique. Ils doivent s'approprier le Christ devenu pour eux sagesse, justice et sanctification et rédemption. Quand on présente la parole de Dieu, il importe de ne pas le faire en termes vagues comme si l'on avançait de simples suppositions. Il faut pouvoir dire avec l'apôtre Pierre : « Ce n'est pas, en effet, en suivant des fables habilement conçues, que nous vous avons fait connaître la puissance et l'avènement de notre Seigneur Jésus-Christ, mais c'est comme ayant vu sa majesté de nos propres yeux. » (2 Pierre 1:16) Tout ministère du Christ et tout éducateur chrétien doivent pouvoir dire avec Jean, l'apôtre bien-aimé : « La vie a été manifestée, et nous l'avons vue et nous lui rendons témoignage, et nous vous annonçons la vie éternelle, qui était auprès du Père et qui nous a été manifestée. » (1 Jean 1:2)

Le terrain au bord du chemin

La parabole du semeur avait pour but de faire comprendre l'influence du terrain sur la croissance de la semence. Le Christ disait virtuellement à ses auditeurs : Vous n'êtes pas qualifiés pour juger mon oeuvre et vous n'avez aucune raison d'être désappointés si je ne partage pas vos idées. L'accueil que vous réservez à mon message est pour vous la chose essentielle, car votre destinée éternelle en dépend.

Jésus donna en ces termes la signification de la semence tombée au bord du chemin : « Lorsqu'un homme écoute la parole du royaume et ne la comprend pas, le malin vient et enlève ce qui a été semé dans son coeur : cet homme est celui qui a reçu la semence le long du chemin. » (Matthieu 13:19)

La semence tombée le long du chemin représente la parole de Dieu qui parvient aux oreilles d'auditeurs distraits. Tel un chemin foulé aux pieds par les hommes et les animaux, le coeur humain devient une grande route où le monde, avec ses plaisirs et ses péchés, peut circuler aisément. Préoccupée par des ambitions égoïstes et complice de combinaisons coupables, l'âme s'est « endurcie par la séduction du péché » (Hébreux 3:13). Les facultés spirituelles sont paralysées. Les hommes entendent la parole de Dieu, mais ne la comprennent pas; ils ne réalisent pas qu'elle les concerne personnellement. Ils ne se rendent compte ni de leurs besoins, ni des dangers qu'ils courent; l'amour du Christ et son message de grâce les laissent indifférents.

De même que les oiseaux guettent la semence qui tombe le long du chemin et s'en emparent, de même Satan se tient prêt à enlever de l'âme la semence de la vérité divine. Il craint que la parole de Dieu ne réveille l'indifférent et ne produise son effet sur le coeur endurci. Satan et ses anges sont présents dans les assemblées où la parole est prêchée. Un combat se livre entre les anges du ciel qui s'efforcent de toucher les coeurs par le divin message et l'ennemi toujours en état d'alerte pour le rendre inefficace. Avec un zèle qui n'a d'égal que sa malice, il s'efforce d'enrayer l'oeuvre de L'Esprit-Saint. Tandis que le Sauveur du monde attire les âmes à lui par son amour, Satan essaie par tous les moyens de détourner leur attention. Il place devant elles des projets mondains, les pousse à la critique, au doute et à l'incrédulité. Le langage ou les gestes du prédicateur ne sont peut-être pas du goût des auditeurs qui s'entretiennent de ses défauts. Ainsi, la vérité dont ils ont besoin et que le Seigneur leur envoie dans sa miséricorde ne produira sur eux aucune impression durable.

Satan a de nombreux collaborateurs en la personne des soi-disant chrétiens qui l'aident à arracher la semence des coeurs. Nombreux sont ceux qui, après avoir écouté la prédication de la parole de Dieu, en font un sujet de critique dans leur foyer. Ils la jugent comme s'il s'agissait d'une production littéraire ou d'un discours politique. Le message qu'ils devraient considérer comme la parole de Dieu parlant à leurs coeurs est l'objet de remarques légères et sarcastiques. Le caractère du prédicateur, ses mobiles, ses actions, l'attitude des autres croyants sont librement discutés. Un jugement sévère est prononcé, on répète des commérages et des calomnies, même devant les inconvertis, et parfois les parents n'hésitent pas à le faire en présence de leurs enfants. On détruit ainsi le respect que l'on doit avoir pour les serviteurs de Dieu et leurs messages, et plusieurs sont amenés à mépriser les saintes Écritures elles-mêmes.

Voilà comment, dans les familles qui se disent chrétiennes, on conduit la jeunesse vers l'incrédulité. Et les parents se demandent pourquoi leurs enfants ont si peu de goût et de dispositions pour l'Évangile et doutent des vérités bibliques! Ils s'étonnent que celles-ci n'aient pas sur eux plus d'influence. Ils ne voient pas que leur propre exemple a endurci le coeur de leurs enfants. La bonne semence ne trouve pas de place où elle pourrait prendre racine et Satan se hâte de la faire disparaître des coeurs.

Dans les endroits pierreux

« Celui qui a reçu la semence dans les endroits pierreux, c'est celui qui entend la parole et la reçoit aussitôt avec joie; mais il n'a pas de racine en lui-même, il manque de persistance, et, dès que survient une tribulation ou une persécution à cause de la parole, il y trouve une occasion de chute. » (Matthieu 13:20,21)

La semence tombée sur le sol rocailleux ne trouve que peu de terre. La plante y lève avec rapidité, mais sa racine, gênée par les pierres et privée des éléments indispensables à son développement normal, ne tarde pas à sécher. Semblables à la roche que recouvre une mince couche de terre, bon nombre de ceux qui font profession de religion sont victimes de leur égoïsme, et leurs plus nobles désirs sont étouffés. L'amour du moi n'a pas été vaincu, et ils n'ont pas compris le caractère excessivement odieux du péché ni éprouvé le sentiment de leur culpabilité. Il se peut que ces gens aient été faciles à convaincre et paraissent de fervents chrétiens. En réalité, ils n'ont que le vernis de la religion.

Ce n'est pas parce que des hommes acceptent rapidement la parole de Dieu ni parce qu'elle fait leur joie, qu'ils l'abandonnent ensuite. Dès que Matthieu eut entendu l'appel de son Sauveur, il se leva et quitta tout pour le suivre. Dieu désire que nous acceptions avec joie la parole sainte aussitôt qu'elle nous parvient. Il y a de la « joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent » (Luc 15:7), et il y a de la joie dans le coeur de celui qui croit en Christ. Mais dans la parabole du semeur, ceux qui ont reçu la parole immédiatement n'ont pas calculé la dépense. Ils n'ont pas compris les exigences de la parole de Dieu. Ils ne la confrontent pas avec toutes leurs habitudes et ne se placent pas entièrement sous son contrôle.

Les racines plongent profondément dans le sol, et, cachées à nos yeux, elles entretiennent la vie de la plante. Il en est de même pour le chrétien : sa vie spirituelle est fortifiée par le lien invisible qui l'unit au Christ par la foi. Mais les auditeurs distraits se confient en leurs propres mérites au lieu de s'en remettre au Christ. Ils comptent sur leurs bonnes oeuvres. Leurs élans de générosité, leur propre justice, la puissance divine leur fait défaut parce qu'ils ne sont pas unis au Christ. Ils n'ont pas de racines en eux-mêmes.

Le soleil bienfaisant de l'été, qui fait croître le bon grain et le mûrit, détruit la semence qui n'a pas de profondes racines. Ainsi celui qui n'a pas de racine en lui-même « manque de persistance, et, dès que survient une tribulation ou une persécution à cause de la parole, il y trouve une occasion de chute » (Matthieu 13:21). Beaucoup reçoivent l'Évangile comme un moyen d'éviter la souffrance et non comme la délivrance du péché. Ils se réjouissent pendant un certain temps, persuadés que la religion les libérera des épreuves et des difficultés. Tout se passe-t-il selon leurs désirs? Ils semblent être de bons chrétiens. Mais ils succombent à la rude épreuve de la tentation. Ils ne peuvent pas endurer l'opprobre pour l'amour du Christ. Dès que la parole de Dieu leur signale qu'ils se complaisent dans tel péché ou exige d'eux quelque renoncement ou sacrifice, ils se scandalisent. Un changement radical de vie leur paraît trop coûteux. Perdant de vue les réalités célestes, ils s'attardent aux soucis du moment. Ils sont semblables aux disciples qui abandonnèrent Jésus en disant : « Cette parole est dure; qui peut l'écouter? » (Jean 6:60)

De nombreuses personnes font profession de servir Dieu, mais ne le connaissent pas réellement. Leur désir de faire sa volonté repose sur leurs propres inclinations, et non sur l'action puissante du Saint-Esprit. Leur conduite n'est pas conforme à la loi de Dieu. Théoriquement, elles reconnaissent que le Christ est leur Sauveur, mais elles ne croient pas qu'il puisse leur donner la force de vaincre leurs péchés. Elles ne sont pas personnellement en rapport avec un Sauveur vivant, et leur caractère révèle des défauts héréditaires et cultivés.

Reconnaître le besoin du Saint-Esprit est une chose, accepter ses appels à la repentance en est une autre. Beaucoup de gens ont le sentiment de vivre loin de Dieu, d'être esclaves de leurs péchés et de leur égoïsme. Ils s'efforcent de se réformer mais ils ne crucifient pas le moi; ils ne s'abandonnent pas entièrement entre les mains de leur Sauveur pour recevoir de lui la force de faire sa volonté; ils ne désirent pas que leur vie soit modelée sur la sienne. D'une façon générale, ils reconnaissent leurs imperfections, mais ne renoncent pas à leurs mauvaises habitudes. Et chaque péché fortifie leur vieille nature égoïste.

Le seul espoir pour ces âmes est d'expérimenter dans leur vie la vérité renfermée dans les paroles du Christ à Nicodème : « Il faut que vous naissiez de nouveau. » « À moins de naître d'en haut, nul ne peut voir le Royaume de Dieu. » (Jean 3:7,3, traduction oecuménique)

La véritable sainteté est une consécration totale au service de Dieu; sans une telle consécration, il ne saurait y avoir de vie chrétienne véritable. Le Christ exige de nous une consécration sans réserve. Il réclame notre coeur, notre esprit, notre âme, nos forces à son service. Celui qui ne vit que pour lui-même n'est pas chrétien.

L'amour doit être le principe de l'action. Il est l'essence même du gouvernement divin sur la terre et dans les cieux. Il faut aussi qu'il soit à la base du caractère chrétien, car c'est le seul élément qui puisse le rendre inébranlable et lui permettre d'affronter victorieusement l'épreuve et la tentation.

L'amour se révélera par le sacrifice. Le plan de la rédemption repose sur un sacrifice dont on ne peut mesurer la hauteur et la profondeur. Le Christ a tout donné pour nous, c'est pourquoi il faut que celui qui l'accepte soit prêt à renoncer à tout par amour pour lui. L'honneur et la gloire du Rédempteur doivent être nos principales préoccupations.

Si nous aimons Jésus, nous aurons le désir de vivre pour lui, de lui présenter nos offrandes d'actions de grâces et de travailler à son service. Notre labeur même paraîtra léger. Par amour pour notre Sauveur, nous accepterons peines, souffrances et sacrifices. Nous éprouverons un amour semblable au sien pour ceux qui se perdent et le même ardent désir de les sauver.

Voilà la religion de Jésus-Christ. Tout ce qui est en dessous de cet idéal n'est qu'illusion. Une simple théorie de la vérité évangélique, ou une simple profession de foi, ne sauvera personne. Nous ne pouvons appartenir au Sauveur qu'en nous donnant entièrement à lui. Celui qui sert Dieu d'un coeur partagé devient irrésolu et instable. Ses efforts en vue de servir à la fois ses propres intérêts et ceux du Christ font de lui un auditeur pour qui la semence est tombée dans un endroit pierreux et qui sera incapable de résister à l'épreuve.

Parmi les épines

« Celui qui a reçu la semence parmi les épines, c'est celui qui entend la parole, mais en qui les soucis du siècle et la séduction des richesses étouffent cette parole, et la rendent infructueuse. » (Matthieu 13:22)

Souvent, la semence évangélique tombe parmi les épines et les mauvaises herbes. Si le coeur humain n'est pas transformé, si les vieilles habitudes d'une vie de péché ne sont pas délaissées, si Satan n'est pas banni de l'âme, la bonne semence sera étouffée par les épines qui croîtront à leur aise.

La grâce ne peut agir que dans le coeur préparé avec soin à recevoir la précieuse semence de la vérité. Les ronces du péché croissent n'importe où et n'exigent aucun entretien, mais la grâce doit être soigneusement cultivée. Les ronces et les épines sont toujours prêtes à envahir le terrain; il faut être continuellement occupé à les détruire. Si le coeur n'est pas placé sous le contrôle de Dieu, si le Saint-Esprit n'est pas constamment à l'oeuvre pour affiner et ennoblir le caractère, les vieilles habitudes reparaîtront sans cesse. D'aucuns peuvent professer croire à l'Évangile, mais si leurs coeurs ne sont pas sanctifiés, leur profession de foi est vaine. S'ils ne remportent pas la victoire sur le péché, c'est le péché qui triomphera d'eux. Les épines qui ont été coupées, mais non déracinées, repoussent de plus belle et envahissent le champ de l'âme.

Le Christ a énuméré les dangers qui mettent l'âme en péril. D'après le récit de Marc, ce sont les « soucis du siècle », la « séduction des richesses » et « l'invasion des autres convoitises » (Marc 4:19). L'Évangile de Luc mentionne « les soucis », « les richesses et les plaisirs de la vie » (Luc 8:14). Voilà ce qui étouffe la parole de Dieu, la semence spirituelle, et l'empêche de se développer. L'âme cesse de tirer sa subsistance du Christ, la spiritualité s'affaiblit et finit par disparaître complètement.

« Les soucis du siècle. » Nul n'est à l'abri de cette tentation. Le travail, les privations et la crainte de la misère oppressent le pauvre et sont pour lui des sujets d'angoisse. Le riche redoute la perte ou la dévaluation de ses richesses. Bien des disciples du Seigneur oublient la leçon qu'il nous a enseignée en parlant des fleurs champêtres (Matthieu 6:28-30). Ils n'ont pas confiance dans sa constante sollicitude. Le Christ ne peut porter leurs fardeaux puisqu'ils ne veulent pas s'en décharger sur lui. Aussi les soucis de la vie qui devraient les rapprocher du Sauveur ne font-ils que les séparer de lui.

Beaucoup pourraient être utiles au service de Dieu, s'ils ne se laissaient dominer par le désir d'acquérir des biens. Toute leur énergie est concentrée sur des entreprises qui leur font négliger leur vie spirituelle. C'est ainsi qu'ils se séparent de Dieu. Les Écritures nous disent : « Ayez du zèle, et non de la paresse. » (Romains 12:11) Nous devons travailler afin de pouvoir venir en aide aux nécessiteux. Il faut que les chrétiens soient actifs, qu'ils entreprennent des affaires et ils le peuvent sans commettre de péché. Mais certains se laissent tellement absorber par leurs occupations qu'ils ne trouvent plus le temps de prier, d'étudier la Bible, de rechercher le Seigneur et de le servir. Il leur arrive parfois d'être attirés vers la sainteté, vers le ciel, mais ils n'ont pas le temps de se détourner du tourbillon du monde pour écouter la voix puissante et infaillible de l'Esprit de Dieu. L'éternité est subordonnée chez eux aux choses du monde, qui occupent dans leurs coeurs la première place. Comment la divine semence pourrait-elle alors porter des fruits? Les énergies spirituelles sont données en pâture aux exigences de la mondanité.

D'autres agissent différemment, et travaillent pour le bien de leurs semblables, mais commettent une erreur analogue. Leurs devoirs sont si pressants et leurs responsabilités si nombreuses qu'ils en oublient l'exercice de la piété. Ils négligent de cultiver la communion avec Dieu par la prière et l'étude de sa parole. Ils ne se souviennent pas de cette déclaration du Sauveur : « Sans moi vous ne pouvez rien faire. » (Jean 15:5) Ils marchent loin de lui et ils échappent à l'influence de la grâce divine; aussi le moi ne tarde-t-il pas à se manifester. Leur service est entaché par un désir de domination et par les traits durs et grossiers d'un coeur irrégénéré. Voilà un des principaux secrets de l'échec du service chrétien. C'est la raison pour laquelle celui-ci donne souvent des résultats si peu satisfaisants.

« La séduction des richesses » (Marc 4:19) L'amour des richesses recèle une puissance de fascination et de séduction. Ceux qui possèdent les biens de la terre oublient trop souvent que c'est Dieu qui donne la faculté de les acquérir. Ils disent : « Ma force et la puissance de ma main m'ont acquis ces richesses. » (Deutéronome 8:17) Au lieu d'être un sujet de reconnaissance envers Dieu, leurs richesses les amènent à se glorifier eux-mêmes. Ils perdent le sentiment de leur dépendance à l'égard du Créateur et de leurs obligations envers leurs semblables. Oubliant de considérer la fortune comme un talent dont il faut faire usage pour la gloire de Dieu et le relèvement de l'humanité, ils l'utilisent à des fins égoïstes. Une telle utilisation des richesses, au lieu de développer en l'homme le caractère de Dieu, favorise l'implantation de celui de Satan. La semence de la parole est étouffée par les épines.

« Les plaisirs de la vie » (Luc 8:14). Les plaisirs que l'on recherche simplement en vue de jouissances personnelles présentent un grand danger. Toute habitude qui affaiblit le corps, obscurcit l'esprit ou émousse les facultés spirituelles, peut être rangée parmi les « convoitises charnelles qui font la guerre à l'âme » (1 Pierre 2:11).

« Et l'invasion des autres convoitises » (Marc 4:19). Les biens de cette vie sont neutres en eux-mêmes; ils deviennent pernicieux à partir du moment où on leur donne la prééminence sur le royaume de Dieu. Tout ce qui éloigne de Dieu, tout ce qui ravit les affections dues au Christ, est un ennemi de l'âme.

Tant qu'on est jeune, vigoureux et susceptible d'un développement rapide, on court le danger de se laisser entraîner par une ambition égoïste. Si l'on réussit dans ses entreprises mondaines, on risque de persévérer dans une ligne de conduite qui émousse la conscience et ne permet pas de discerner ce qui constitue l'excellence du caractère. Lorsque les circonstances favorisent ce développement, on a vite fait de s'engager dans une voie contraire à la parole de Dieu.

Durant cette période de formation de leurs enfants, les parents ont une très grande responsabilité. Ils devraient s'efforcer d'entourer la jeunesse d'influences saines qui lui permettront d'acquérir une juste conception de la vie et la conduiront au véritable succès. Malheureusement, combien de parents sont dominés par le souci d'un avenir matériel brillant pour leurs enfants, dont ils choisissent les relations à cet effet! Bien des couples s'établissent dans de grandes villes et introduisent leurs enfants dans la haute société. Ils les entourent ainsi d'influences propres à favoriser l'orgueil et la mondanité et avilissantes pour l'esprit et l'âme. On perd de vue le but noble et élevé de la vie, on échange contre quelques avantages temporels le privilège d'être des fils de Dieu et des héritiers des biens éternels.

Bien des parents pensent travailler au bonheur de leurs enfants en encourageant leur passion pour les amusements. Ils admettent qu'ils soient captives par le sport et leur permettent d'assister à des parties de plaisir; ils leur donnent de l'argent, qu'ils peuvent dépenser sans scrupules en vue de leur satisfaction personnelle. Or, plus on se livre au plaisir, plus il devient une obsession. Ces jeunes gens sont à tel point absorbés par les amusements qu'ils finissent par les considérer comme le but principal de la vie. Ils contractent des habitudes de paresse et de laisser-aller qui les rendent incapables de devenir de bons chrétiens.

Il arrive que l'Église, qui devrait être « la colonne et l'appui de la vérité », encourage l'amour égoïste du plaisir. Quand l'Église a besoin d'argent, à quels moyens a-t-elle recours? Aux ventes de charité, aux buffets, aux tombolas et autres procédés de ce genre. Souvent, on profane le lieu de culte mis à part pour le service divin, en le transformant en salle de festin où l'on vient pour manger et pour boire, acheter, vendre et s'égayer. Le respect pour la maison de Dieu est diminué dans l'esprit des jeunes. Les barrières de la maîtrise de soi sont ébranlées. On fait appel à des mobiles égoïstes, à l'appétit et au désir de paraître, que l'on renforce en montrant de l'indulgence.

Les villes sont des centres d'amusements et de plaisirs. Bien des parents, en s'y établissant, croient offrir ainsi de plus grands avantages à leurs enfants, mais ils sont vite désappointés et regrettent trop tard leur grave erreur. Aujourd'hui, nos villes deviennent semblables à Sodome et à Gomorrhe. De trop nombreux jours fériés encouragent l'oisiveté. Les sports excitants, le théâtre, les courses de chevaux, le jeu, la consommation des boissons enivrantes stimulent les passions. La jeunesse se laisse entraîner par le courant populaire. Ceux qui apprennent à aimer le plaisir pour lui-même ouvrent toute grande la porte de leur coeur aux tentations. Ils s'adonnent à une gaieté intempestive et à une joie insouciante, et leurs relations avec les amateurs de plaisirs les grisent. En goûtant à toutes les formes de dissipation, ils finissent par n'avoir plus ni la force ni la volonté de mener une vie utile. Leurs aspirations religieuses s'évanouissent en fumée et leur vie spirituelle est enveloppée de ténèbres. Toutes les facultés les plus nobles de l'âme qui relient l'homme au monde spirituel sont altérées.

Il est vrai que certains peuvent se rendre compte de leur triste condition et se repentir. Dieu peut leur pardonner, mais leur âme a reçu une grave blessure, et ils seront toute leur vie en danger de retomber. Leur faculté de discernement, dont la sensibilité aurait dû être développée pour qu'ils puissent distinguer entre le bien et le mal, a été en grande partie détruite. Ils sont lents à reconnaître la voix du Saint-Esprit parlant à leur coeur ou à discerner les pièges de Satan. Trop souvent, à l'heure du danger, ils succombent à la tentation et s'éloignent de Dieu. Leur vie se termine par un échec aux conséquences éternelles.

Soucis, richesses, plaisirs, tels sont les atouts dont Satan se sert dans le jeu de la vie. Un avertissement nous est donné : « N'aimez point le monde, ni les choses qui sont dans le monde. Si quelqu'un aime le monde, l'amour du Père n'est point en lui; car tout ce qui est dans le monde, la convoitise de la chair, la convoitise des yeux, et l'orgueil de la vie, ne vient point du Père, mais vient du monde. » (1 Jean 2:15,16) Celui qui lit dans les coeurs comme dans un livre ouvert, dit : « Prenez garde à vous-mêmes, de crainte que vos coeurs ne s'appesantissent par les excès du manger et du boire, et par les soucis de la vie. » (Luc 21:34) L'apôtre Paul écrit à son tour, sous l'inspiration du Saint-Esprit : « Mais ceux qui veulent s'enrichir tombent dans la tentation, dans le piège, et dans beaucoup de désirs insensés et pernicieux qui plongent les hommes dans la ruine et la perdition. Car l'amour de l'argent est une racine de tous les maux; et quelques-uns, en étant possédés, se sont égarés loin de la foi, et se sont jetés eux-mêmes dans bien des tourments. » (1 Timothée 6:9,10)

La préparation du terrain

Par la parabole du semeur, le Christ montre que les différents résultats obtenus par les semailles dépendent de la nature du terrain. Dans chaque cas, le semeur et la semence sont les mêmes. Le Sauveur souligne de cette manière que si la parole de Dieu reste sans effet sur notre vie, c'est de notre faute. Mais les conséquences n'échappent pas à notre contrôle. Il est vrai que nous ne pouvons pas nous changer nous-mêmes, mais le libre choix nous appartient et c'est à nous de décider quelle sera notre destinée éternelle. Rien n'oblige les auditeurs représentés par la semence tombée le long du chemin, dans les endroits pierreux, ou parmi les épines, à rester dans cette condition. L'Esprit de Dieu s'efforce sans cesse de rompre le charme qui les retient au monde et d'éveiller en eux le désir des biens impérissables. C'est parce qu'ils résistent à l'Esprit que les hommes finissent par ne plus prendre garde aux appels de la parole de Dieu et par en négliger l'étude. Ils sont eux-mêmes responsables de la dureté de leur coeur, qui empêche le bon grain de s'y enraciner, et des mauvaises herbes qui l'étouffent.

Il faut cultiver ce jardin qu'est le coeur; il faut en défricher le terrain par une profonde repentance et en arracher les plantes nuisibles semées par Satan. Lorsqu'un champ est envahi par des ronces, ce n'est que par un travail énergique qu'on parvient à l'en débarrasser. De même, les mauvaises tendances du coeur naturel peuvent seulement être vaincues par des efforts persévérants accomplis au nom de Jésus et par sa grâce. Par le canal de son prophète, le Seigneur nous donne cet ordre : « Défrichez-vous un champ nouveau, et ne semez pas parmi les épines. » (Jérémie 4:3) « Semez selon la justice. Moissonnez selon la miséricorde. » (Osée 10:12) Jésus désire accomplir cette oeuvre en notre faveur et fait appel à notre coopération.

Les semeurs de la bonne parole ont une tâche à remplir pour préparer les coeurs à recevoir l'Évangile. Le ministère de la prédication comporte trop de sermons et pas assez de cure d'âme. Un travail personnel est nécessaire pour sauver ceux qui périssent. Animés d'une sympathie chrétienne, nous devrions nous approcher des personnes individuellement et nous efforcer de les intéresser aux grandes vérités de la vie éternelle. Leur coeur peut être aussi dur que les sentiers battus et il peut nous sembler dès l'abord que nos efforts sont inutiles, mais là où la logique et les arguments échouent, l'amour de Jésus-Christ, révélé dans notre apostolat, peut attendrir les coeurs de pierre et permettre à la semence de la vérité d'y prendre racine.

Les semeurs ont donc un travail à faire pour que la bonne semence ne soit pas étouffée par les épines ou ne périsse pas faute de terre. Il faut enseigner au croyant, dès le début de son expérience religieuse, les principes fondamentaux de la vie chrétienne. Il faut lui apprendre qu'il n'est pas sauvé seulement par le sacrifice de Jésus, mais qu'il doit refléter le caractère du Christ et vivre de sa vie. Enseignez à chacun qu'il doit porter des fardeaux et délaisser ses inclinations naturelles. Qu'il ait une idée exacte du bonheur qu'on éprouve à travailler pour le Christ, à le suivre dans la voie du renoncement et à tout supporter comme un bon soldat. Qu'il apprenne à se confier en son amour, à lui abandonner ses soucis, et qu'il goûte la joie qu'apporte le salut des âmes. Dans son amour pour ceux qui périssent, il s'oubliera lui-même; les plaisirs du monde perdront leur puissance d'attraction, et les fardeaux ne réussiront pas à le décourager. La charrue de la vérité fera son oeuvre et défoncera le sol en friche. Elle ne se contentera pas de couper les épines; elle les déracinera complètement.

Dans la bonne terre

Le semeur ne rencontre pas que des déceptions. En parlant de la semence tombée dans la bonne terre, le Sauveur nous déclare que celui qui entend la parole et la comprend « porte du fruit, et un grain en donne cent, un autre soixante, un autre trente. » (Matthieu 13:23) « Ce qui est tombé dans la bonne terre, ce sont ceux qui, ayant entendu la parole avec un coeur honnête et bon, la retiennent, et portent du fruit avec persévérance. » (Luc 8:15)

Ce « coeur honnête et bon » dont parle la parabole n'est pas un coeur sans péché, car l'Évangile doit être prêché à ceux qui sont perdus. Le Christ a dit : « Je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs. » (Marc 2:17) Le coeur honnête est celui qui cède à l'action du Saint-Esprit. Il confesse ses fautes, éprouve le besoin du pardon et de l'amour de Dieu et a le sincère désir de connaître la vérité et de lui obéir. Un coeur bon est un coeur qui a foi en la parole de Dieu. Sans la foi, il ne peut recevoir cette parole. Il faut, dit l'Écriture, « que celui qui s'approche de Dieu croie que Dieu existe, et qu'il est le rémunérateur de ceux qui le cherchent. » (Hébreux 11:6)

« Celui qui entend la parole et la comprend. » Les pharisiens du temps du Christ fermaient les yeux pour ne pas voir et se bouchaient les oreilles pour ne pas entendre; c'est pourquoi la vérité n'atteignait pas leurs coeurs. Leur ignorance et leur cécité volontaires leur ont coûté cher. Le Christ enseigna à ses disciples qu'ils devaient être réceptifs à ses instructions et prêts à croire. Il prononça sur eux une bénédiction parce qu'ils entendaient la parole et la recevaient avec foi.

L'auditeur qui reçoit la semence dans la bonne terre accepte la parole « non comme la parole des hommes, mais, ainsi qu'elle l'est véritablement, comme la parole de Dieu. » (1 Thessaloniciens 2:13) Seul celui qui reçoit les Écritures comme la voix de Dieu lui parlant personnellement est un vrai disciple. Il tremble en l'entendant, car pour lui elle est une réalité vivante; il lui ouvre son intelligence et son coeur. Corneille et ses amis étaient des auditeurs attentifs quand ils disaient à Pierre : « Nous sommes tous devant Dieu, pour entendre tout ce que le Seigneur l'a ordonné de nous dire. » (Actes 10:33)

La connaissance de la vérité dépend beaucoup moins du quotient intellectuel que de la pureté des intentions et de la simplicité d'une foi vivante. Les anges de Dieu se tiennent auprès de ceux qui recherchent le conseil du Seigneur avec humilité. Le Saint-Esprit leur est accordé pour leur dévoiler les trésors précieux de la vérité.

Les auditeurs représentés par la bonne terre gardent la parole après l'avoir entendue. Satan et tous ses agents ne peuvent la leur ravir.

Il ne suffit pas d'écouter ou de lire la parole de Dieu. Celui qui désire faire un bon usage des Écritures doit méditer sur la vérité qui lui a été présentée. Par une attention soutenue et des prières ferventes, il doit chercher à comprendre la signification des paroles de vérité, et boire à longs traits à la source des oracles sacrés.

« Dieu nous invite à nourrir notre esprit de pensées nobles et pures. Il veut que nous méditions sur son amour et sa miséricorde, que nous contemplions la grande oeuvre de la rédemption. La vérité nous apparaîtra toujours plus clairement; nos aspirations vers la pureté du coeur et la clarté des idées seront plus élevées et plus saintes. L'âme qui se nourrit de pensées nobles et élevées sera transformée par la communion avec Dieu qu'elle trouvera dans l'étude des Écritures.

« Et porte du fruit. » Ceux qui ont entendu la parole et qui la gardent porteront du fruit par leur obéissance. Reçue dans l'âme, cette parole se manifestera par de bonnes oeuvres. Elle permettra l'édification d'un caractère et d'une vie conformes à l'idéal proposé par le Christ. Voici ce qu'il dit de lui-même : « Je veux faire ta volonté, mon Dieu! Et ta loi est au fond de mon coeur. » (Psaume 40:9) « Je ne cherche pas ma volonté, mais la volonté de celui qui m'a envoyé. » (Jean 5:30) L'Écriture ajoute encore : « Celui qui dit qu'il demeure en lui doit marcher aussi comme il a marché lui-même. » (1 Jean 2:6)

La parole de Dieu entre souvent en conflit avec nos tendances héréditaires ou acquises et avec nos mauvaises habitudes, mais l'auditeur représenté par la bonne terre reçoit la parole et se soumet à toutes ses exigences; tout son comportement est dès lors sous le contrôle de celle-ci. À ses yeux, les commandements de l'homme borné et sujet à l'erreur sont insignifiants à côté de la parole du Dieu infini. C'est de tout son coeur et avec une détermination inébranlable qu'il aspire à la vie éternelle. Même s'il devait subir la persécution, perdre ses biens et jusqu'à sa vie, il obéira à la vérité.

Et il porte du fruit « avec persévérance ». Aucun de ceux qui reçoivent la parole de Dieu n'est à l'abri des difficultés et des épreuves, mais le véritable chrétien ne se laisse pas aller à l'impatience, au doute et à l'abattement. Même si nous ne pouvons pas connaître l'issue de l'épreuve et comprendre les desseins de Dieu à notre égard, nous ne devons pas perdre confiance. Souvenons-nous au contraire de la miséricorde de notre Dieu; déchargeons-nous sur lui de tous nos soucis et attendons patiemment l'heure de la délivrance.

L'épreuve fortifie la vie spirituelle. Supportée vaillamment, elle modèle notre caractère et nous apporte de grandes bénédictions. La tempête et l'obscurité sont parfois nécessaires pour amener à maturité ces fruits parfaits de la foi que sont la douceur et l'amour.

« Le laboureur attend le précieux fruit de la terre, prenant patience à son égard, jusqu'à ce qu'il ait reçu les pluies de la première et de l'arrière-saison. » (Jacques 5:7) De même, le chrétien doit attendre patiemment que la parole de Dieu fructifie dans sa vie. Lorsque nous prions pour recevoir les grâces du Saint-Esprit, souvent Dieu exauce nos prières en nous faisant passer par certaines circonstances qui favorisent le développement de ses fruits en nous. Comme nous ne comprenons pas ses desseins, nous nous étonnons et sommes consternés. Cependant, ces grâces ne peuvent se développer sans suivre des lois comparables à celles qui régissent la croissance de la plante. Notre rôle est donc de recevoir la parole, de la garder avec soin et de nous soumettre à elle sans réserve. Alors seulement les desseins de Dieu se réaliseront en nous.

« Si quelqu'un m'aime, dit le Christ, il gardera ma parole, et mon Père l'aimera; nous viendrons à lui, et nous ferons notre demeure chez lui. » (Jean 14:23) Nous vivrons sous l'attrait d'un esprit fort et parfait parce que nous serons en liaison étroite avec la source de puissance éternelle. Dans notre vie en Dieu, nous serons captifs de Jésus-Christ; nous ne vivrons plus en égoïstes, mais le Christ vivra en nous. Son caractère se reflétera dans le nôtre, et c'est ainsi que nous produirons les fruits du Saint-Esprit : « trente, soixante, et cent pour un ». (Marc 4:20)